OUVERTURES

Dans un précédent « mot » qui faisait suite à mon élection et dans lequel j’énumérais mes projets et ceux du bureau, pour notre Société, je plaidais pour davantage d’ouverture – à toutes les catégories de personnes qui s’intéressent au droit international, y compris aux internationalistes de droit privé dont la présence dans notre compagnie n’est pas à la hauteur de nos espoirs, et aux praticiens, qui sont à la portion congrue si on compare leur place parmi nous à celle des universitaires – au sein des organes de l’American Society, la parité est systématique. Je n’ai pas encore mené l’investigation sur les attentes de nos membres et des non-membres de la Société, dont je parlais dans ce mot, mais, doucettement, les choses avancent et nous publierons bientôt sur ce site sinon les résultats, du moins les questionnaires de cette enquête. Nous réfléchissons aussi aux moyens de diversifier les intervenants à nos colloques même si, après étude, le renouvellement des auteurs de rapports et de communications est plus satisfaisant que certains le pressentaient.

Ouverture aussi à d’autres langues et d’abord à l’anglais ; certes nous ne sommes pas la French Society for International Law (alors que la Deutsche Gesellschaft für Internationales Recht a franchi le pas et est devenue complètement bilingue en s’acceptant comme German Society of International Law), mais notre vocation n’est-elle pas, d’abord, de diffuser la pensée internationaliste « française » ? Ce n’est pas en nous retranchant derrière un exclusivisme francophone farouche que nous y parviendrons : il nous enfermerait dans un entre nous stérile et accentuerait notre provincialisme. Il nous faut accepter les apports de collègues anglophones lors de nos réunions et de nous exprimer nous mêmes dans la langue de McNair, Manley Hudson et Hersch Lauterpacht si nous voulons être compris du plus grand nombre. Dans cette perspective, je n’ai pas renoncé à offrir aux internautes une version anglaise (abrégée) de notre site, remarquablement rénové grâce au travail et à la disponibilité de Franck Latty et Xavier Aurey, même si cela se révèle un peu plus compliqué que je l’avais pensé au départ.

Ouverture à d’autres langues ? pourquoi pas ? mais on risque d’additionner un « provincialisme » à d’autres… En tout cas, on ne peut pas tout faire à la fois même s’il ne faut surement pas négliger l’espagnol parlé par tout un continent. Mais il y a d’autres vecteurs que la langue pour s’ouvrir à d’autres cultures juridiques. L’une des orientations qui me paraît envisageable est de renforcer nos relations avec les sociétés sœurs – qu’elles soient nationales ou régionales, consacrées au droit international ou à des disciplines voisines et complémentaires, le droit européen ou constitutionnel par exemples ou les relations internationales. C’est dans cet esprit qu’en préface au colloque de la SFDI de 2015, qui aura lieu à Strasbourg, nous avons prévu une rencontre avec toutes ces institutions pour discuter nos problématiques respectives et complémentaires et, le cas échéant, envisager des actions communes.

Dans le même esprit, à côté de notre colloque annuel, deux conférences nous donneront, d’ici la fin de l’année, l’occasion de dialoguer, avec la Société italienne pour le droit international à Courmayeur du 26 au 28 juin, sur « L’avenir des organisations internationales » à l’invitation de la SIDI et du professeur Michele Vellano, l’autre à Louvain, pour un nouveau colloque franco- (et, cette fois, belgo)-allemand, organisé par le professeur Pierre D’Argent et consacré au « Droit des frontières internationales », les 14 et 15 novembre. Ces rencontres s’ajoutent à notre colloque annuel, qui se tiendra à Lyon du 22 au 24 mai. Organisé avec enthousiasme par notre collègue Stéphane Doumbé-Brillé avec le soutien efficace de Kiara Neri, il nous permettra de revisiter un thème traditionnel mais dont la problématique est aujourd’hui profondément renouvelée : « Développement et droit international ».

Il ne saurait être question de sacrifier nos colloques et journées d’étude (les actes de celles consacrées au Pouvoir normatif de l’OCDE (2013) et aux Réserves aux traités (2014) viennent de paraître pour la première, et sont sous presse pour la seconde – belle occasion d’adresser mes remerciements et félicitations aux directeurs de ces publications, Hervé Ascensio et Mathias Forteau et Muriel Ubeda-Saillard, et aux éditions Pedone, auxquelles le droit international doit tant. Mais il nous faut aussi inventer de nouvelles formes d’action, de nouvelles coopérations, d’autres ouvertures.

Chers membres de la Société, tout ceci a un coût. Je viens donc vous rappeler à vos devoirs associatifs et vous demander de vous acquitter de votre cotisation dès que possible. Légèrement augmentée l’an dernier, elle est encore très modeste et, malheureusement, insuffisante pour aller très au-delà dans la diversification, pourtant souhaitable, de nos activités, qui suppose sans doute à terme une autre augmentation (modeste) des cotisations, mais aussi la recherche d’autres sources ou d’autres modalités de financement.

Alain PELLET