HESSEL

STÉPHANE HESSEL

(1917-2013)

 

Résistant et rescapé des camps de concentration, Stéphane Hessel a eu une vie se caractérisant par ses engagements sans faille en faveur des droits de l’homme. Il naquit en 1917 à Berlin, obtint la naturalisation française à l’âge de 20 ans, puis étudia à l’École normale avant que son parcours soit interrompu par la Seconde guerre mondiale. Au sortir de la guerre, Stéphane Hessel passa le concours du Quai d’Orsay, comprenant notamment une épreuve de droit international, matière à laquelle son beau-père, Boris Mirkine-Guetzévitch l’avait familiarisé. Sa carrière fut ensuite rythmée par des postes aux Nations Unies et au Quai d’Orsay. En 1988, il donna un enseignement au Deep Springs College (Californie) portant sur l’Organisation des Nations Unies et la place que les États-Unis y occupent.

Un engagement en faveur des droits de l’homme : de la Déclaration universelle à la Conférence de Vienne

En 1946, Hessel occupa son premier poste aux Nations Unies auprès de Henri Laugier, Secrétaire général adjoint. Avec son équipe, il travaillait alors à la manière dont pourraient être alliées deux dispositions de la Charte de San Francisco : celle prévoyant la promotion des droits de l’homme d’un côté et celle affirmant la non-intervention de l’Organisation dans les affaires intérieures de ses Membres de l’autre. Dans cette optique, l’objectif était alors l’adoption d’un texte de promotion et de protection des droits de l’homme, une « brèche dans le mur de la souveraineté » selon Stéphane Hessel.

En tant que secrétaire à la troisième commission de l’Assemblée générale des Nations Unies, Hessel assista aux débats et négociations qui menèrent à la rédaction puis à l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il rencontra notamment René Cassin et Eleanor Roosevelt. Le 10 décembre 1948, il assista à l’adoption de la Déclaration universelle, un souvenir qu’il décrivit comme l’un des moments les plus émouvants de sa vie.

Par la suite, Hessel ne cessa de promouvoir et de défendre les valeurs ayant été consacrées au sein de la Déclaration universelle des droits de l’homme. De 1991 à 1994, il fut président de la délégation française à la Commission des droits de l’homme. Il représenta également la France à la Conférence de Vienne en 1993.

En 2008, il expliqua que si la Déclaration universelle des droits de l’homme devait être actualisée, les relations entre les humains et la Terre devraient y être ajoutées.

Un homme au service des Nations Unies : « Pour justifier ma survie, c’est cette organisation que je servirai »

En tant que diplomate, Hessel croyait en l’importance du multilatéralisme. L’Organisation des Nations Unies représentait pour lui l’espoir d’un avenir meilleur. Ainsi, même en poste au Quai d’Orsay, son engagement envers l’Organisation ne cessa jamais. Il assura auprès du ministère des Affaires étrangères la direction de la représentation de la France dans les institutions internationales et notamment à l’ONU (1951-1954), puis, il fut nommé à la tête de la direction des Nations Unies et des organisations internationales (1969-1971).

Hessel rejoignit de nouveau les Nations Unies au début des années 1970 en tant qu’administrateur adjoint au Programme des Nations Unies pour le développement. Le développement fut en effet une autre de ses priorités, en tant que complément nécessaire à l’action en faveur des droits de l’homme. Pour y parvenir, l’ONU était encore une fois pour Hessel le meilleur cheminement. L’amélioration des relations entre le Nord et le Sud et la réduction des injustices et inégalités dans le monde devaient selon lui passer par un accroissement de l’autorité de l’Organisation.

Comme il l’avait commencée, Hessel termina sa carrière auprès des Nations Unies en tant qu’ambassadeur auprès de l’Organisation à Genève (1977-1981). Dans ce cadre, il œuvra de manière significative pour le développement en tentant d’influencer les délibérations de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement en faveur d’un partage plus équitable des ressources. Il tenta d’orienter les négociations afin que les fondements d’un nouvel ordre économique mondial soient mis en place.

Un engagement perpétuel : son appel à s’indigner, à s’engager et à « refuser l’inacceptable »

Malgré la fin de sa carrière diplomatique, Stéphane Hessel ne cessa pas toute activité et son engagement perdura. Il fut ainsi membre, entre autres, de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (1982-1986), du Haut conseil de coopération internationale (1999-2002), du Comité national de commémoration du cinquantième anniversaire de l’ONU (institué en 1994) mais encore de la Commission française consultative des droits de l’homme (1993-2005). Il participa également à des colloques et fut actif au sein du débat public sur des sujets tels que l’immigration ou le conflit israélo-palestinien. Il dénonça dans ce cadre les crimes de guerre commis par Israël, prises de position qui lui valurent certaines critiques.

En 2011, Stéphane Hessel publia un court livre au sein duquel il appelle, notamment la jeune génération, à s’indigner et à défendre encore aujourd’hui les principes et les valeurs de la Déclaration universelle. En 2012, Hessel, lança un nouvel appel, avec Albert Jacquard, à exiger un désarmement nucléaire total. Cet ouvrage illustre la foi et l’espoir que Stéphane Hessel plaçait dans le droit international qu’il présente comme un outil pouvant permettre l’abolition totale des armes nucléaires, épée de Damoclès au-dessus des êtres humains.

Lors du décès de Stéphane Hessel, en 2013 à 95 ans, le Conseil des droits de l’homme observa une minute de silence en son honneur, première fois dans l’histoire que le Conseil rendit un tel hommage, ce qui témoigne de la reconnaissance de l’engagement de Stéphane Hessel.

 

Laura KHENNOUF

Doctorante contractuelle à l’Université Paris Nanterre

 

Sources : F. Genton, Ph. Greciano (dir.), Stéphane Hessel. Les perspectives d’un engagement, Paris, LGDJ, 2020, 228 p. ; S. Hessel, Tous comptes faits… ou presque, Paris, Libella, 2012, 197 p. ; S. Hessel, Danse avec le siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1997, 312 p. ; K.-H. Standke, « La vie miraculeuse de Stéphane Hessel. Entre « Éros et Thanatos », Hommage à l’occasion du centenaire de sa naissance », Allemagne aujourd’hui, 2018, vol. 1, n° 223, pp. 58-67.

 

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

 

Ouvrages

Palestine : la trahison européenne, Paris, Fayard, 2013, 282 p.

Exigez ! : un désarmement nucléaire total, Paris, Stock, 2012, 65 p. [Co-écrit avec Albert Jacquard].

Tous comptes faits… ou presque, Paris, Libella, 2012, 197 p.

Indignez-vous, Montpellier, Indigène Éditions, 2011, 29 p.

Engagez-vous, entretiens avec Gilles Vanderpooten, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 2011, 92 p.

Citoyen sans frontières : conversations avec Jean-Michel Helvig, Paris, Fayard, 2008, 319 p.

Danse avec le siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1997, 312 p.

 

Articles

« La réforme de l’ONU et le droit international humanitaire » in N. Andersson et al., Justice internationale et impunité, le cas des États-Unis, Paris, L’Harmattan, Collection Questions contemporaines, L’Harmattan, 2007, pp. 99-103

« Terrorisme et résistance » in Gh. Doucet, Terrorisme, victimes et responsabilité pénale internationale, Paris, Calmann-Lévy, 2003, pp. 375-378

« La France et la diplomatie multilatérale » in Guy Ladreit de Lacharrière et la politique juridique extérieure de la France, Paris, Masson, 1989, pp. 279-289 (article mis en ligne avec l’aimable autorisation des éditions Elsevier Masson)

« La formation des experts et la coopération technique multilatérale. L’expérience du PNUD », Collection IDERIC, 1973, n° thématique, pp. 27-30

« L’assistance technique multilatérale », Revue Tiers monde, 1973, n° thématique, pp. 721-747

 

Interview

Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, Stéphane Hessel raconte la déclaration universelle des droits de l’homme (10 décembre 2010)

 

Hommage

F. Genton, Ph. Greciano (dir.), Stéphane Hessel. Les perspectives d’un engagement, Paris, LGDJ, 2020, 228 p.

Ch. Hessel, G. Vanderpooten (dir.), Stéphane Hessel, irrésistible optimiste, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 2013, 272 p.

K.-H. Standke, « La vie miraculeuse de Stéphane Hessel. Entre « Éros et Thanatos », Hommage à l’occasion du centenaire de sa naissance », Allemagne aujourd’hui, 2018, vol. 1, n° 223, pp. 58-67